Sarkozy "adhère à l’essentiel" du rapport Attali


S’il a affirmé adhérer « à l’essentiel » des 316 propositions du rapport Attali sur la croissance à « quelques désaccords » près, Nicolas Sarkozy est resté flou mercredi sur leur application. Il a en revanche d’emblée exclu de supprimer les départements ou de renoncer au principe de précaution.

La commission présidée par l’ancien conseiller de François Mitterrand a remis mercredi son rapport de plus de 200 pages au chef de l’Etat. Objectif affiché: « libérer la croissance », avec parfois des propositions iconoclastes comme le transfert des cotisations sociales sur la CSG et la TVA, la mise sous condition de ressources des allocations familiales, le recours accru à l’immigration, l’ouverture totale des professions réglementées (taxis, notaires, pharmaciens, etc.) et de la grande distribution ou la suppression des départements d’ici dix ans.

« Notre rapport est techniquement applicable, financièrement équilibré, sans augmenter les impôts », a assuré Jacques Attali. Il a demandé à Nicolas Sarkozy d’en appliquer la totalité et ce « rapidement ». « C’est un rapport prêt à être mis en place et être appliqué, et pas à être mis à l’étude », a-t-il insisté.

« Ce que vous proposerez, nous le ferons », s’était avancé Nicolas Sarkozy en août dernier en installant la commission. Il s’est montré plus prudent mercredi, évitant de se prononcer sur les pistes les plus sensibles. « On va reprendre une très très grande partie de vos propositions », a-t-il simplement assuré.

« Nous lancerons un séminaire gouvernemental début février pour décider et coordonner les mesures prioritaires », a-t-il précisé. « Votre rapport ne terminera pas sur les rayons d’une bibliothèque », a-t-il promis, proposant aux membres de la commission de les « retrouver dans six mois pour faire le point ». Et « je ferai tout pour que vous ne soyez pas déçus ».

Nicolas Sarkozy s’est dit d’emblée en « désaccord » avec la suppression des départements d’ici dix ans proposée par la rapport. « Je ne crois pas que les Français sont prêts à renoncer à la légitimité historique des départements », a-t-il plaidé, alors que les élus locaux sont vent debout contre cette idée. « Ce n’est pas une question de peur. C’est une question de priorité ».

Il s’est dit opposé aussi à une remise en cause du principe de précaution, actuellement inscrit dans la Constitution.

Concernant l’ouverture des professions réglementées qui provoque déjà une levée de boucliers chez les intéressés, il y est favorable en ce qui concerne les taxis, mais juge « beaucoup plus difficile » l’autorisation de la vente de produits de parapharmacie dans les grandes surfaces. Les pharmacies ont aussi une « véritable mission de service public » en milieu rural et « on peut pas réduire tout à la seule question des tarifs », a-t-il souligné.

Nicolas Sarkozy a par ailleurs souhaité que « les partenaires sociaux expertisent » le « contrat d’évolution » qui doit permettre de rémunérer les chômeurs en formation.

Quant à la suppression des lois Galland et Raffarin qui encadrent la grande distribution, « c’est un sujet très difficile », a-t-il noté. « Il faut que j’ai une majorité pour le voter et il faut un cheminement pour y arriver. C’est comme ça », a-t-il plaidé.

Favorable à la réduction des délais de paiement pour les PME, il s’est montré réticent sur la mise en place de « class actions » à la française autorisant les consommateurs à entamer des actions collectives en justice: « je demande à réfléchir ».

Le chef de l’Etat n’a pas eu un mot sur le recours accru à l’immigration que prône la commission. Autre sujet sensible omis dans son intervention: le transfert d’une partie des cotisations sociales sur la CSG et la TVA, ce qui rappelle fortement le projet de « TVA sociale » qui avait valu à l’UMP de perdre quelques sièges aux législatives.

Il ne s’est pas non plus prononcé sur les pistes avancées pour financer ces mesures, alors que la commission se fixe pour objectif une stabilisation des dépenses publiques en volume. Elle propose notamment de mettre sous conditions de ressources des allocations familiales, de supprimer les 60 niches fiscales et de redéployer les crédits actuellement dévolus à la formation professionnelle.

« Si l’ensemble de ce rapport est mis en oeuvre, le taux de croissance pourrait être au moins d’un point supplémentaire à la mi-2012, le taux de chômage pourrait être ramené à 5% (…), le chômage des jeunes pourrait être divisé par trois » et « la dette publique serait réduite à 55% », a affirmé Jacques Attali. Mais « maintenant, la responsabilité n’est plus la nôtre », a-t-il noté.