Rôle de la police : d’abord arrêter les délinquants !


La France connaît depuis quelques jours une flambée de violences urbaines. Des individus sans foi ni loi n’hésitent plus à tirer à balles réelles sur les représentants de la République, à saccager, piller et brûler des écoles. Un père de famille est battu à mort à coups de pieds et de poings sous les yeux des siens. Une personne handicapée, coincée dans un bus, est aspergée d’essence avant d’être enflammée. Devant ce déferlement de violences gratuites, on est en droit d’attendre de tous du discernement et de la dignité, plutôt qu’une exploitation politicienne des événements.

Par Nicolas Sarkozy, Le Monde du 6 novembre 2005

Faut-il être inconscient et bien peu responsable pour trouver encore le temps de polémiquer quand les fondements de la paix civile et de l’ordre républicain sont en cause et que la vie même de certains de nos compatriotes est menacée ?

Mais puisqu’une tribune hier, a été offerte dans les pages de ce journal, à des propos et des commentaires qui relèvent de la polémique, je ne peux, chargé que je suis de la sécurité et des libertés des Français, me taire.

La stratégie que ce gouvernement met en œuvre maintenant depuis quatre ans est la bonne. Je la défends plus encore aujourd’hui qu’hier, non parce qu’elle serait une stratégie de « droite », mais parce qu’elle est à ce jour la seule qui ait fait ses preuves. Ceux qui la contestent en ce moment pour des raisons purement idéologiques ont la mémoire courte. Les Français, eux, n’ont sans doute pas oublié le triste record de cette politique angélique et calamiteuse : plus de 4,1 millions de crimes et de délits constatés en France en 2002 ! Et déjà, les violences urbaines, ne l’oublions pas ! En deux ans, en nous montrant résolument pragmatiques, nous avons ramené ce chiffre à 3,8 millions, soit presque 8% de moins. Et cette diminution se poursuit cette année encore. En octobre 2005 nous avons enregistré 17 % de crimes et de délits de moins qu’en octobre 2001.

N’ayant tiré aucunes leçons de leurs échecs successifs et de ce vaste mouvement d’exaspération populaire qui a conduit au 21 avril 2002, les socialistes qui avaient la charge de notre sécurité persistent dans l’erreur. Non, nous n’abandonnerons pas le souci d’efficacité et de pragmatisme qui est le nôtre, pour ressortir leur conception hémiplégique de la police de proximité qui n’était en fait que du laxisme et de la faiblesse déguisés.

Je suis favorable à la police de proximité. J’appartenais en 1994 au Gouvernement qui l’a introduite dans notre droit. Et je trouve excellent que la police cultive des liens étroits avec la population, soit à l’écoute de ses besoins, rencontre les associations et les professionnels. Mais, comme je l’ai déjà expliqué à diverses reprises, la police de proximité ne peut se construire au détriment de la police d’investigation et d’interpellation. Ce n’est pas l’une sans l’autre : mais l’une avec l’autre. Je considère que le rôle de la police n’est pas de faire de l’animation sportive. J’ai préféré remobiliser les forces de sécurité sur leur cœur de métier, renforcer leurs moyens d’action, et remettre les victimes au centre de leur mission.

Aujourd’hui, Police et Gendarmerie sont non seulement chargées de maintenir l’ordre, mais aussi d’interpeller les auteurs de crimes et de délits. A chacun son métier. Les médiateurs sont faits pour dialoguer, les forces de l’ordre d’abord pour arrêter les délinquants : c’est peut-être ça le vrai changement et l’origine des affrontements présents. Nous ne tolérons plus les zones « interdites », où le crime organisé et les trafics mafieux règnent en maître et où les honnêtes gens sont obligés de se taire et de baisser les yeux.

De la même façon que nous avons réussi à rétablir la sécurité dans les transports publics, notamment en Ile-de-France, grâce à un renforcement sans précédent des effectifs, nous ramènerons l’ordre et la tranquillité dans ces territoires depuis trop longtemps laissés à l’abandon. Partout sur le sol de la République, et pas seulement dans les beaux quartiers, les Français ont le droit de vivre en sécurité, sans craindre pour leurs biens ou leur intégrité physique. C’est un droit absolu pour chacun d’entre nous.

Et je demande que l’on mesure bien l’enjeu fondamental de la présence de la police dans les banlieues. La police est la police de la République. Elle assure l’ordre de la République. Si elle ne le faisait pas, quel ordre lui succéderait ? Celui des mafias ou celui des intégristes.

Mon nom est conspué dans les rangs des bandes qui terrorisent les quartiers. La belle affaire ! C’est dans l’ordre des choses. Ce qui me choquerait plutôt, c’est qu’ils me portent aux nues.

Manifestement, si les criminels et les voyous n’aiment guère notre politique de sécurité les Français la soutiennent.

Ce que nos concitoyens apprécient depuis 2002, c’est indiscutablement les objectifs clairs de la politique de lutte contre l’insécurité. Celle-ci s’appuie en effet, désormais, sur le bon sens et non plus sur l’idéologie : les victimes ont droit à davantage de protection et de compassion que leurs agresseurs ; la loi est faite, avant tout, pour protéger les faibles ; la prévention, qui est indispensable, ne doit pas exclure la répression, chaque fois qu’elle s’avère juste et nécessaire.

Devant les actes de sauvagerie et de vandalisme – je ne fais aucun amalgame entre les voyous et l’immense majorité des jeunes de banlieues qui ne songent qu’à réussir leur vie -, les Français peuvent compter sur la totale détermination du Gouvernement.