La journée particulière de Nicolas Sarkozy


A la une du Parisien le matin, sur le plateau de TF1 le soir : Nicolas Sarkozy fut une nouvelle fois la vedette de la journée. De son dernier Conseil des ministres au dîner avec son prédécesseur à l’UMP, Alain Juppé, récit d’une journée.

11 heures 30 : Chirac rend un vibrant hommage… à Raffarin

Affluence particulière pour le dernier Conseil des ministres de «Sarko» ministre des Finances. Photographes et cameramen se ruent sur le ministre qui peine à se frayer un chemin jusqu’à sa voiture. Il assure n’avoir «pas de regret ni de nostalgie» avant de s’engager dans «une nouvelle aventure» à la tête de l’UMP. Les rares ministres qui acceptent de répondre aux questions des journalistes ne manifestent pas d’émotion particulière. «Vous regrettez le départ de Nicolas Sarkozy ?» «Je n’ai pas l’impression de m’en séparer», sourit Laurent Hénart, le benjamin du gouvernement.

Quelques minutes plus tôt, dans le huis clos du Conseil, le toujours ministre des Finances a présenté une communication relative à l’ouverture du capital d’EDF. Puis le président de la République et le premier ministre lui rendent hommage. Soulignant que Nicolas Sarkozy avait assumé ses fonctions «avec beaucoup d’énergie au service des Français», Jean-Pierre Raffarin lui exprime sa «gratitude pour son action comme ministre de l’Intérieur puis comme ministre de l’Economie et des Finances».

Encore plus sobre, le président de la République «s’associe» à cet hommage et exprime «son estime et sa reconnaissance pour l’action conduite au gouvernement par Nicolas Sarkozy depuis deux ans et demi». Des propos on ne peu plus mesurés, banals, dits «amicalement, tout simplement», selon Eric Woerth, secrétaire d’Etat à la Réforme de l’État et trésorier de l’UMP. «Sur un ton chaleureux même», prétend Jean-François Copé.

Surtout, pour contrebalancer cet hommage obligé, Jacques Chirac en rend un, inattendu et appuyé, à Jean-Pierre Raffarin pour son voyage au Mexique, «exemplaire» de ce que doit faire le gouvernement pour «faire progresser les intérêts économiques» de la France «partout dans le monde». Des mots qui font chaud au coeur du premier ministre.

12 heures. A Bercy, mais déjà à l’UMP

Le Conseil terminé, Nicolas Sarkozy regagne aussitôt le ministère des Finances. Mais c’est déjà le président de l’UMP qui est au travail. Dans son bureau avec vue sur la Seine, il reçoit Jean-Claude Gaudin, Pierre Méhaignerie et François Fillon, le trio avec lequel il dirigera le parti majoritaire. Les quatre hommes règlent les derniers détails du déroulement du congrès et s’interrogent sur le nombre des ministres qui prendront la parole. «Villepin n’osera pas parler», pronostique l’un d’eux.

La table de verre est ensuite recouverte d’une nappe. Dans le même bureau, Sarkozy déjeune avec des journalistes. Et se dit «soulagé» de quitter le gouvernement. «C’est vrai que j’ai hésité à prendre cette décision, mais j’avais toujours dit que je ne resterai pas plus de trois ans au gouvernement. Et le 14 juillet m’a convaincu que cette stratégie était la bonne(NDLR : l’intervention télévisée de Jacques Chirac sur le thème «je décide, il exécute»)», confie-t-il, encore surpris «qu’ils se fassent prendre le parti comme ça»…

15 heures : une place vide à l’Assemblée

«Monsieur le Ministre, on part à l’Assemblée ?». En terminant son café, Nicolas Sarkozy renvoie son chauffeur. «Non, je n’ai de questions pour moi.» Lui qui s’est souvent offert des succès dans l’hémicyle sèche la dernière séance des questions d’actualité. A la droite du premier ministre – seule une travée les sépare –, la place attribuée au premier des ministres est vide. Les députés croient d’abord à un retard. Dans les couloirs, ils cherchent à analyser cette absence. «A mon avis, il n’avait pas envie de cette séance bilan. C’est un choix de communication. Il est déjà dans l’«après», estime un député UMP. «Tout est polarisé sur sa grande intervention télévisée avant le congrès», affirme un sarkozyste. L’un des collaborateurs de Sarkozy explique que le ministre «ne vient pas quand il n’a pas de questions». Mais depuis le début de la législature, ses absences se comptent sur les doigts d’une main. «Il n’a pas l’intention de partir puisqu’il va revenir» comme député des Hauts-de-Seine, ajoute-t-on dans son entourage. Mais pour plusieurs UMP, «il est déjà ailleurs, il a tourné la page».

16 h 30 : un tour au Sénat

On l’attendait à l’Assemblée, mais c’est au Sénat que se rend le ministre des Finances, pour rencontrer Christian Poncelet. Puis il retourne à Bercy, préparer son intervention sur TF1 où il est le premier invité de «Face à la une».

21 heures 30 : Juppé à Bercy

Décidément, Sarkozy n’oublie rien. Si, dans l’attente de la décision de la cour d’appel de Versailles, Alain Juppé ne viendra pas au Bourget assister au sacre de son successeur, le ministre de l’Economie et des Finances l’a invité à dîner à Bercy. «Entre nous deux, ça s’est beaucoup apaisé», confie le futur patron de l’UMP.

Nicolas et Cécilia chez Jacques et Bernadette

Reçu samedi dernier par Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy retournera dimanche prochain à l’Élysée à l’issue du congrès de l’UMP. Mais les deux hommes seront cette fois accompagnés de leurs épouses, Bernadette et Cécilia. Après l’entretien politique, «des sujets qui fâchent à ceux qui ne fâchent pas», comme le confie l’un des deux, place à la rencontre conviviale. Les deux couples partageront un apéritif pour mettre en scène leur entente et convaincre de leur volonté de travailler ensemble dans un climat apaisé.

Le Figaro – 24 nov 2004