Projet de loi de finances pour 2005


Intervention de M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie

Projet de loi de finances pour 2005 Conférence de presse du mercredi 22 septembre 2004 – Bercy

Mesdames et Messieurs,

Je présente aujourd’hui le projet de loi de finances pour 2005. Il est le reflet d’une volonté politique, de choix que nous assumons et que nous revendiquons.Le projet de loi de finances, ce n’est pas un exercice à part, au sein d’une politique économique .C’est un élément essentiel de cette politique économique que je mets en œuvre depuis 6 mois.

Il s’agit de recréer pour notre pays des marges de manœuvre, cela afin qu’il puisse se diriger enfin vers une croissance durable et soutenue. Construire le budget de la France, c’est donc s’inscrire dans une perspective de croissance.

Quelle est notre situation aujourd’hui ? Quelles sont nos perspectives ? Quels sont nos objectifs ? Comment comptons nous les atteindre ? Voici les quatre questions auxquelles je vais m’attacher à répondre.


QUELLE EST LA SITUATION ÉCONOMIQUE AUJOURD’HUI ?

Au plan mondial

La croissance de 2004 aura été l’une plus fortes des trente dernières années, avec un taux de progression de 4,5 %, une hausse de l’ordre de 4 % aux États-Unis, et des chiffres un peu supérieurs en Asie .

Il faut s’attendre à un ralentissement de la croissance mondiale en 2005, sous l’effet de « l’atterrissage » de l’économie chinoise, du resserrement en cours des politiques monétaires aux États-Unis et au Royaume-Uni, et de l’accentuation récente des tensions sur le prix du pétrole.

Mais cette croissance reste forte puisqu’elle devrait se situer à près de 4 % en 2005 – dont environ 3 % aux États-Unis

En Europe, la reprise se confirme

La croissance de la zone euro s'est élevée à un rythme annuel de +2 à +2½ % au 1er semestre 2004, en raison de la vigueur du commerce mondial, de la stabilisation du taux de change de l'euro – après une appréciation de 40 % par rapport au dollar ces deux dernières années – et d'un redressement, de la consommation.

Cette croissance reflète cependant des performances très disparates entre les pays. Alors qu’en France, en Espagne et en Belgique, la reprise s’appuie sur une demande interne dynamique, la situation de l’Allemagne, de l’Italie et des Pays-Bas reste fragile : en Allemagne, la croissance demeure principalement tirée par les exportations, même si des signes de stabilisation de l’emploi et de redressement de la consommation sont apparus ces tout derniers mois ; l’Italie continue à pâtir d’un faible niveau de confiance et d’une performance médiocre de ses exportations, les Pays-Bas ont enregistré un nouveau recul de l’activité au printemps.

Au total , avec un environnement international toujours porteur – bien qu’en ralentissement – la croissance européenne pourrait s’établir à +2,2 % en moyenne en 2005, après +1,9 % en 2004.


En France, l’économie s’est redressée. La croissance devrait atteindre 2,6 %, voire 2,7 % si l’on en croit l’OCDE en 2004, après 1,2 % en 2002 et à peine 0,5 % en 2003.

Première bonne nouvelle, la reprise a d’abord été soutenue par la consommation des ménages et les chiffres du 2e trimestre le confirment , avec une hausse de +0,7 % sur trois mois, soit un niveau très élevé, en progression de 2,7 % par rapport au 2e trimestre de l’an dernier. Et même si les chiffres provisoires de la consommation de produits manufacturés (qui ne représentent cependant qu’un quart de la consommation totale) en juillet et août marquent une stabilisation, la progression de la consommation devrait monter au minimum à +2,4 % en moyenne cette année – contre +1 % au plus pour l’ensemble de la zone euro.

Deuxième bonne nouvelle, la reprise de 2004 a été aussi celle de l’investissement : après deux années de fort recul des dépenses d’équipement – près d’un tiers – on observe un retournement. Dans l’enquête réalisée en juillet par l’Insee, les chefs d’entreprises anticipent pour l’ensemble de l’année 2004 une progression de 8 % des investissements en valeur dans l’industrie concurrentielle : ce chiffre est l’un des plus élevés depuis 1991.

Quant à nos exportations, après quatre trimestres de recul, de la mi-2002 à la mi-2003, la tendance s’est redressée. Elles progressent à nouveau, de +1,1 % au deuxième trimestre et deux fois plus vite au troisième trimestre. C’est là aussi une bonne nouvelle, mais c’est une amélioration qui doit être confortée, car nous ne sommes pas suffisamment présents dans les zones les plus dynamiques de l’économie mondiale.

La croissance retrouvée ne s’accompagne pas d’une réelle tension inflationniste : certes l’inflation a atteint +2,4 % sur un an au mois d’août, mais ce chiffre est dû pour beaucoup aux prix du pétrole et à la hausse du prix du tabac à l’automne 2003 et en janvier 2004.

La situation la plus préoccupante reste celle de l’emploi, avec un taux de chômage de 9,8 %. C’est le problème majeur de notre pays. Et c’est un véritable mal français dans la mesure où même en période de croissance nous avons beaucoup de difficultés à le faire refluer. Des signes encourageants apparaissent cependant. 12 000 emplois salariés marchands ont été créés entre le point bas de septembre 2003 et juin 2004.Par ailleurs, le taux de chômage a baissé de 9,9 % fin juin à 9,8 % fin juillet, soit 10 000 chômeurs de moins sur le mois. Le chômage des jeunes, très sensible aux fluctuations de l’activité, a reculé pour le 2e mois consécutif, de 5 000. Les entrées à l’ANPE pour fin de CDD ou de mission d’intérim ont diminué fortement, de 13 000.

Ce retour de la croissance en France n’est pas du seulement au contexte international. .Nous avons agi pour rétablir la confiance.

   * Par le redressement de nos comptes publics. Il ne peut y avoir de rétablissement durable de la confiance si les Français ont le sentiment que les comptes publics ne sont pas maîtrisés, et que par conséquent leurs revenus risquent d’être sollicités. Nous ne pouvons nous résigner au creusement du déficit budgétaire. C’est la raison des efforts engagés pour stabiliser les dépenses. Le déficit budgétaire de cette année sera ramené à 49,1 milliards d’euros. Les déficits publics dans leur ensemble ne dépasseront pas en 2004 3,6 % du PIB : nos engagements européens seront tenus,au prix d’importants efforts.
   * en agissant sur le pouvoir d’achat des ménages : c’est le sens de l’accord sur la baisse des prix des produits de la grande distribution qui représentera un gain de pouvoir d’achat de l’ordre de 0,3 point d’ici le début de 2005, alors que les prix alimentaires avaient augmenté de 3 % en moyenne par an entre 2000 et 2003.

À ce jour les prix de 3 500 produits de grande marque ont baissé. Nous nous acheminons vers 4 000 à la fin de ce mois qui représentent 70 % du chiffre d’affaires grandes marques des distributeurs.

   * en incitant les ménages à consommer, sans grever les comptes publics, par des mesures ciblées et limitées dans le temps. C’est le sens des trois mesures engagées en mai dernier.
         o Celle en faveur des donations aux enfants et petits enfants, qui oriente de l’épargne vers une population plus encline à consommer qui connaît un grand succès ; pour les seuls mois de juin, juillet, août, plus de 90 000 donations ont été effectuées au moyen du nouveau dispositif soit le double de ce qui était attendu .Cela représente un montant de 1,6 Md €.          o Celle qui rend le crédit à la consommation moins coûteux grâce à la déduction d’une partie des intérêts. Les premiers éléments disponibles nous rendent optimistes. En juillet 2003 les crédits à la consommation avaient baissé de 85 millions. En juillet 2004 ils ont progressé de 400 millions. La fédération des Banques françaises estime à + 6 % les flux de nouveaux crédits sur les mois de juin, juillet et août.          o S’agissant du déblocage des réserves de participation, à fin août, période qui n’est pas la plus favorable, près de 1 000 avenants aux accords de participation et d’intéressement avaient déjà été signés, couvrant 321 000 salariés .Les déblocages ont été amorcés avec 75 millions d’euros, et les professionnels nous indiquent que les demandes d’information et de déblocage marquent une très forte accélération depuis la rentrée
   * Dans le même temps, la mesure de dégrèvement de taxe professionnelle sur les investissements a eu l’impact sur l’investissement que je soulignais il y a quelques instants.
   * Dans ce contexte :
   * les créations d'emploi dans le secteur marchand pourraient s'élever à 190 000 sur l'année 2005,
   * L’inflation qui devrait se maintenir à +2,2 % en moyenne annuelle en 2004 devrait se limiter, sous l’hypothèsed'un repli très graduel du prix du pétrole à 36,5 dollars le baril, à +1,8 % en moyenne annuelle 2005, en raison principalement des baisses de prix dans la grande distribution et de la fin des hausses de taxes sur le tabac.
   * au total, après +0,3 % seulement en 2003, la progression du pouvoir d'achat du revenu des ménages s'établirait à +1,5 % en 2004 et à +2,2 % en 2005.

Dans ces conditions la croissance française serait de + 2,6 % en 2004, soit un point de plus que la croissance européenne. Voilà qui devrait mettre un terme à la polémique sur l’efficacité de notre politique économique. En 2005, elle devrait garder un rythme de croissance supérieur à la moyenne européenne : +2,5 %, contre +2,2 % pour la zone euro.

C’est sur cette toile de fond qu’a été construit le projet de loi de finances pour 2005

QUELLES SONT NOS PRIORITÉS ?

Ces priorités consistent toutes à refuser la fatalité. Il n’y a de fatalité, ni aux déficits, ni aux délocalisations, ni à une croissance faible. Il faut trouver le chemin de la prospérité. Poser les conditions d’un véritable pacte pour la prospérité.

Première condition : la réduction du déficit

Notre endettement – 1000 milliards d’euros – ne nous permet pas d’avoir une politique économique efficace, nous condamne à des prélèvements obligatoires élevés, nous enlève nos marges de manœuvre. Le remboursement des intérêts de notre dette constitue – avec près de 40 milliards d’Euros – le deuxième budget civil de l’État. Je préférerais consacrer cet argent, à bien d’autres choses : au développement des entreprises, à la baisse des impôts ou à des politiques sociales novatrices. Ce serait plus satisfaisant que de servir des intérêts aux établissements financiers.

Ce sont les raisons qui m’ont conduit à consacrer les 5 milliards de plus values fiscales de 2004, au service du désendettement. C’est le contraire de la gestion de la « cagnotte » de 1999/ 2000, où étaient apparus 11 milliards d’euros de plus values fiscales affectés pour une large part à des dépenses nouvelles.

Il convient d’ailleurs d’aller plus loin en inscrivant dans la loi une règle de répartition des plus values de recettes éventuelles – par exemple les deux tiers au désendettement. Il ne faut pas y revenir dès qu’une recette non prévue apparaît. Un projet de loi organique portant code de bonne conduite budgétaire, sera présenté en même temps que la loi de finances 2005. Il ne s’agit pas de figer les choses mais de garantir un principe général de bonne et saine gestion.

Pour 2005, le budget de l’État est construit. autour de cet impératif de maîtrise du déficit. Son solde s’établit à – 44,9 milliards d’euros, soit une amélioration de plus de 10 milliards d’euros par rapport à la LFI 2004 Ce sera dans notre histoire budgétaire la plus forte réduction du déficit réalisé d’une année sur l’autre.

Pour la première fois depuis 2001, les déficits publics seront inférieurs à 3% du PIB.

Pour la troisième année consécutive, les dépenses de l’État, stabilisées à 288,8 milliards d’euros (à structure constante), progresseront d’une façon rigoureusement égale à l’inflation prévisionnelle : 1,8 %.

Au total, c’est une marge de 17 milliards d’euros qui a été dégagée et qui permet de consacrer 10 milliards à la réduction du déficit, 5 milliards d’euros aux priorités du gouvernement et 2 milliards d’euros à des mesures fiscales pour la croissance et l’emploi.

Pour que le budget ne progresse pas en volume, des efforts exigeants, compte tenu de la rigidité intrinsèque des dépenses publiques, ont été nécessaires.

Ainsi le projet de loi de finances prévoit la suppression de plus de 10 000 emplois. Compte tenu de 3 000 créations d’emplois dans les ministères prioritaires, les effectifs totaux diminuent en net de près de 7 200 emplois. Mis à part ceux qui ont été retenus comme prioritaires tous les ministères ont contribué à la réduction des effectifs, par exemple le ministère des finances pour plus de 2 200 emplois, l’équipement pour 1 400 et la défense pour plus de 1 000. C’est depuis au moins 20 ans le plus gros effort de réduction des effectifs civils de l’État.

2e condition : une croissance durable et soutenue

Seule une croissance durable à un niveau élevé peut rétablir la confiance. Seule elle permettra de faire face aux défis qui sont devant nous.

Notre croissance est trop faible depuis le début des années 80. Elle n’a été que de 2 % en moyenne, alors que la croissance américaine est restée sur une tendance supérieure à 3 % par an. Or un point de croissance en plus, cela voudrait dire 100 000 chômeurs de moins dans l’année, cela voudrait dire un déficit public mécaniquement amélioré de un demi point de PIB soit près de 8 milliards d’euros par an .

Pour regagner cette croissance, tout n’a pas été essayé. Il faut se battre sur plusieurs fronts à la fois .

En améliorant notre compétitivité par l’allègement des charges pesant sur nos entreprises et nos emplois

– Je voudrais rappeler le poids budgétaire des allègements de charges sociales : 16,2 milliards d’euros en 2003, 17,1 milliards d’euros en 2004 et en 2005, auxquels va se rajouter un milliard d’euros pour l’hôtellerie et la restauration.

– La réduction à 1,5 % en 2005 du taux de la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, avant sa suppression complète en 2006, est une mesure très attendue, qui va redonner à notre pays un taux effectif d’imposition de 33,33 %, inférieur d’un point à 2004, mais ,je le souligne, encore supérieur à la médiane européenne qui est de 30 %.

De même le dispositif de dégrèvement de taxe professionnelle au titre des investissements nouveaux, qui a été institué par la loi sur la consommation et l’investissement, est prorogé de six mois, jusqu’à la fin de l’année 2005. Cette mesure doit donner une meilleure visibilité aux entreprises pour investir. Ces deux mesures représentant un effort de 1,1 milliard d’euros.

Et à propos de charges, je voudrais tout de suite avant que vous me posiez la question, répondre à l’affirmation publiée hier selon laquelle les prélèvements obligatoires progresseraient en 2005 pour atteindre 44,2 % du PIB. Il est exact que des prélèvements nouveaux interviendront en 2005 au titre de l’assurance maladie. Il est tout aussi exact que nous baisserons les impôts et les charges de 2 milliards. Ce qu’oublient les auteurs de cette affirmation c’est qu’un taux de prélèvement obligatoire se calcule en fonction de la hausse du PIB d’une part et que d’autre part certains prélèvements comme les recettes d’impôts sur les sociétés augmentent plus vite que le PIB lorsqu’il y a croissance. Il en est de même des cotisations sociales lorsqu’il y a croissance de la masse salariale.

Le taux de prélèvement obligatoire était de 43,8 % en 2002, de 43,8 % en 2003, de 43,6 % en 2004. Il sera de 43,7 % et non de 44,2 % en 2005 comme certains média ont pu l’évoquer. Il n’augmente pas. Il est stabilisé. En 1999, le taux de PO était de 45,5 %.

En développant des outils financiers adaptés aux besoins des PME

– Les PME ont besoin de fonds propres. C’est la raison pour laquelle j’ai signé voici quelques jours avec les compagnies d’assurances une convention par laquelle elles s’engagent à investir d’ici à 3 ans plus de 6 milliards d’euros supplémentaires dans des entreprises non cotées.

C’est aussi la raison pour laquelle une mesure fiscale nouvelle est proposée qui conditionne le bénéfice des exonérations des contrats d’assurance vie investis en actions au respect de quotas d’investissement dans ce type de sociétés. 10 % des titres devraient être investis dans des sociétés non cotées ou de faible capitalisation.

Dans le même esprit il est proposé d’élargir le spectre des entreprises financées par les FCPI : le seuil de l’effectif salarié des sociétés éligibles est porté de 500 à 2 000 salariés. Par ailleurs les FCPI pourrait financer les sociétés innovantes par l’intermédiaire de holdings.

– En se donnant les moyens de développer nos exportations : le projet de loi de finances comporte une première mesure en ce sens, qui est l’institution d’un crédit d’impôt pour dépenses de prospection commercial, ouvert aux PME en dehors de l’espace économique européen. Actuellement, les PME qui veulent développer leurs exportations en dehors de l’espace économique européen ne bénéficient d’aucun crédit d’impôt pour faire de la prospection commerciale. Or, l’enjeu du commerce extérieur est justement américain, sud américain, asiatique : il est donc grand temps d’aider les PME à s’y lancer, c’est que nous proposons avec un crédit d’impôt égal à 50 % des dépenses de prospection des marchés situés en dehors de l’espace économique européen, dans la limite de 15 000 euros .

En se dotant d’une première série de mesures pour lutter contre les délocalisations

C’est un sujet sensible et complexe. La mondialisation crée des marchés nouveaux pour nos entreprises. Elle permet à ceux qui en sont exclus d’accéder au progrès. Dans certains cas, des implantations à l’étranger sont le seul moyen de conquérir des parts de marché. En clair, si nous ne construisons pas d’usine d’automobiles en Asie, nous n’exporterons pas de voitures dans les pays en cause .

Mais les déménagements purs et simples d’activités pour des raisons de dumping fiscal et social dévastent des régions, des pans d’activité, des savoir faire industriels. Nous ne pouvons ni ignorer, ni minimiser ce phénomène qui inquiète nos concitoyens. À juste titre nul ne se sent plus à l’abri. Je suis convaincu qu’il faut agir. Les choix des chefs d’entreprise sont souvent faits à la marge .Nous pouvons bouger les marges en les amenant à se poser autrement la question d’une éventuelle délocalisation. Il faut au minimum tenter une nouvelle stratégie. C’est pourquoi le projet de loi de finances comporte trois ensembles de mesures

   – Pour prévenir les délocalisations :

Une trentaine de bassins d’emploi qui connaissent les taux de chomage les plus élevés ou sont menacés de délocalisations seront répertoriés. Un crédit d’impôt de 1 000 euros par emploi sera versé chaque année pendant trois ans aux entreprises industrielles et à celles du secteur tertiaire délocalisables dans ces bassins d’emploi .On estime que 400 000 emplois seront concernés.

   – Pour les relocalisations :

Un crédit d’impôt sur les bénéfices sera institué pour les entreprises qui choisissent de relocaliser leurs activités en France. Les dépenses de personnel correspondent aux emplois ramenés en France seront prises en charge par l’État, la première année au taux de 50 %, et cela de façon dégressive pendant cinq ans.

– La lutte contre les délocalisations passe aussi par la création d’un potentiel puissant d’innovation pour nos entreprises, par la synergie entre l’entreprise, la recherche, et la formation. Sur le modèle mis en place pour les jeunes entreprises innovantes l’an dernier, les entreprises participant au projet collectif de recherche et de développement au sein du pôle bénéficieront d’exonérations d’impôt sur les bénéfices, ainsi que sur les cotisations de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties. Pour ceux de leurs employés qui se consacreront à des activités de recherche et d’innovation elles seront exonérées de 50 % des cotisations sociales, selon leur taille.C’est ainsi que nous pourrons développer de grands projets, relancer de grandes aventures industrielles comme celles de l’Airbus ou de l’énergie nucléaire. Je pense aux biotechnologies, à l’énergie, au génie logiciel, aux nanotechnologies.

En faisant de la recherche une priorité par la croissance

Un milliard d’euros de moyens nouveaux y sont consacrés dans le cadre du plan national en faveur de la recherche. 300 millions abonderont les ressources de crédit d’impôt recherche. 300 millions renforceront le budget du ministère au profit de nos grands organismes. 350 millions de crédits extra budgétaires provenant des recettes de privatisations constitueront la première dotation de l’Agence nationale de la recherche qui financera des projets sélectionnés sur des critères d’excellence et notamment dans la perspective d’améliorer la coopération entre les établissements.

En encourageant les Français à créer des emplois

   * C’est l’objet du relèvement du plafond de la réduction d’impôt pour les emplois à domicile .Cette mesure, instaurée par la gauche en 1992, est fortement créatrice d’emplois : 1,6 million de particuliers emploient du personnel à domicile, contre 500 000 en 1991. Les employeurs sont principalement des personnes de plus de 70 ans et des personnes invalides. Les avantages sont triples. On donne du travail à des salariés peu qualifiés. On procure des recettes à la sécurité sociale en décourageant le travail au noir. On permet aux familles de déduire de leur IRPP les charges d’un emploi à domicile, exactement comme une entreprise peut le faire.
   * C’est l’objet des mesures en faveur de l’apprentissage. Notre ambition consiste à passer de 350 000 apprentis à 500 000 d’ici 5 ans.
     Le financement de l’apprentissage sea amélioré par la création d’une ressource propre pour les régions, la « contribution au développement de l’apprentissage » destinée à remplacer progressivement – en trois ans – la dotation de décentralisation apprentissage. Cette contribution, de 0,06 % en 2005, montera en charge jusqu’à 0,18 % en 2007, date à laquelle elle remplacera intégralement l’actuelle dotation.
     Il en résultera une simplification et une rationalisation des circuits de financement ainsi qu’une hausse globale de l’effort consacré à l’apprentissage : cette contribution, assise sur la masse salariale, sera en effet plus dynamique que la dotation de décentralisation qu’elle remplace.
     Mais ce n’est que combinée au nouveau crédit d’impôt apprentissage que cette réforme prend tout son sens. Ce crédit d’impôt, devrait s’élever à 1 600 € par an et par apprenti employé dans l’entreprise. Il passera à 2 200 € dans le cas où le jeune en question connaît des difficultés d’insertion particulière. Combinée à la nouvelle « contribution au développement de l’apprentissage », le système fonctionnera comme une sorte de « bonus-malus » : les entreprises qui embaucheront des apprentis verront leur crédit d’impôt plus que compenser la nouvelle contribution ; les autres, connaîtront un léger alourdissement de leurs charges.

Troisième condition du pacte pour la prospérité : le respect de nos engagements

   * Les lois de programmation sont respectées, qu’il s’agisse de la loi de programmation militaire, avec une enveloppe totale de 15,20 milliards d’euros pour les crédits d’équipement de la Défense, de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, avec par exemple la création de 1 000 postes de policiers et de 700 postes de gendarmes, ou de la loi d’orientation et de programmation pour la justice, pour laquelle l’enveloppe de crédits initialement prévue pour 5 ans sera au bout de 3 ans déjà consommée à hauteur de 83 %, et où 1 100 emplois seront créés .
   * La loi de cohésion sociale est financée à hauteur d’un milliard comme il était prévu.
   * L’accroissement de l’aide publique au développement est poursuivi, afin de contribuer à tenir l’engagement de la France de porter notre effort total à 0,5 % du PIB en 2007. L’objectif pour 2005 sera de 0,44 % du PIB, contre 0,42 % en 2004, avec un effort particulier en faveur des pays les plus pauvres et de la lutte contre les pandémies.

Ces trois lois bénéficient d’une augmentation globale d’un milliard d’euros

Quatrième condition du pacte : un budget pour tous

Le projet de budget comporte deux mesures importantes :

– Les allègements de charges qui permettront au 1er juillet 2005 de revaloriser le SMIC de 3,7 % de plus que l’inflation, c’est-à-dire en prévisionnel de 5,5 %

– Les crédits réduisant les charges de l’hôtellerie et de la restauration qui sont la contrepartie de la suppression du Smic hôtelier qui je le rappelle se traduit par une hausse de 11 % du Smic dans les professions du secteur d’activité.

– La prime pour l’emploi voit son barème revalorisé de 4 %.La dépense est de 400 millions. Elle permettra de maintenir le soutien public aux revenus de 8,2 millions de personnes.

– Les modalités d’imposition des personnes liées par un pacte civil de solidarité sont alignées sur celles applicables aux contribuables mariés. Ainsi, les personnes souscrivant un Pacs seront soumises, dès sa conclusion, à une imposition commune. Ces dispositions s’appliqueront à compter de l’imposition des revenus perçus au cours de l’année 2004. De même s’appliquera l’abattement de 20 % sur la résidence principale en cas de succession. Et le régime fiscal des SARL de familles sera étendu aux personnes liées par un Pacs. Ces mesures répondent à un souci très fort de non discrimination de la part des personnes intéressées.

– Un effort particulier est consacré au logement social et à la rénovation urbaine. 90 000 nouveaux logements sociaux devraient voir le jour en 2005, un niveau de construction qu’on n’avait pas vu depuis les années 80. Parallèlement, des moyens importants sont mis en uvre en faveur de la production de logements à loyers maîtrisés, et à la remise sur le marché de logements vacants. La production de logements à loyers maîtrisés, financés par l’ANAH, devrait ainsi passer de 20 000 à 40 000 unités par an.

Le projet de loi de finances prévoit le relais du prêt à taux zéro par un dispositif de crédit d’impôt pour la première accession à la propriété .Ce crédit d’impôt sera calculé sur le revenu de l’accédant à la propriété pour 7 années et versé à l’établissement prêteur afin de permettre la constitution de l’apport personnel et le calcul immédiat de la bonification d’intérêt. Pour le bénéficiaire la démarche auprès de la banque ne sera donc pas modifiée. Le dispositif nouveau comportera cependant par rapport à l’actuel trois avancées :il vise un doublement du nombre de bénéficiaires, 200 000 au lieu de 100 000 ; il permettra l’acquisition de logements anciens (qui bien sûr doivent répondre aux conditions de salubrité fixés par les textes) et pas seulement des logements neufs ;il restera prioritairement concentré sur les ménages les plus modestes, mais en permettant aux ménages intermédiaires de prétendre à une aide dont ils étaient jusque là exclus.

Un exemple : pour un jeune couple résidant en Île-de-France, dont le revenu salarié s’élève à 40 000 euros, et qui achète un premier appartement avec un emprunt de 140 000 euros à 4,5 % sur 15 ans le crédit d’impôt serait de 3 623 euros, alors qu’aucun avantage n’est accessible pour lui dans le dispositif du prêt à taux zéro.

– Enfin il faut permettre aux Français de transmettre le fruit de leur travail à leurs enfants. C’est un choix économique. C’est aussi un choix politique, un choix de société. Ce projet de transmission est ce qu’il y a de plus légitime dans une vie, il ne faut plus le dissuader par une fiscalité trop lourde. Le projet de loi de finances comporte un abattement de 100 000 euros sur la valeur du bien transmis. Et contrairement à ce qui a été dit ce n’est pas une mesure pour les riches. Lorsqu’un enfant unique reçoit de son parent un patrimoine de 60 000 €, il paye aujourd’hui 1 150 € de droit de succession. S’il reçoit un patrimoine de 100 000 €, il paye 9 100 € d’impôt. Il paye 19 100 € de droits s’il reçoit un patrimoine de 150 000 €. S’il reçoit un patrimoine de 200 000 €, il paye 29 100 €. Ce ne sont pas là des patrimoines très importants et pourtant les droits eux sont lourds. Avec la réforme que je propose, les droits à payer seront respectivement de 0 €, 0 €, 8 300 € et 18 300 €. L’économie d’impôt sera ainsi respectivement de 100 %, 100 %, 56 % et 37 %. Cet exemple montre bien, en même temps que l’avantage fiscal, à situation familiale identique, sera proportionnellement plus important pour les petits patrimoines que pour les patrimoines les moins modestes.

Telles sont les principales mesures du projet de loi de finances pour 2005. Je l’ai dit : c’est un projet qui refuse la fatalité. C’est un budget volontariste qui ne sacrifie pas l’avenir au présent. C’est un projet qui exprime la conviction qu’il est indispensable de renouer avec une croissance forte dans la durée.